Dans l'article précédent “Hommage à l’invisible résilience des femmes expatriées”, nous avons rendu hommage à toutes ces femmes qui, en mettant certains aspects de leur vie entre parenthèses, ont permis à leur famille de s’épanouir en expatriation. Mais, après avoir fait ces sacrifices, pourquoi est-il si difficile de se remettre au centre de sa propre vie ? Pourquoi l'idée même de se prioriser peut sembler si étrangère, voire égoïste ?
Vous avez tout mis en œuvre pour que l’expatriation soit une réussite pour votre famille, et dans ce processus, vous avez oublié une chose essentielle : vous aussi, vous avez des besoins, des rêves, des aspirations.
Se prioriser commence souvent par une question toute simple, mais dont la réponse n’est pas si évidente : "Qu’est-ce que je veux vraiment ?"
Les croyances invisibles qui vous freinent
L’une des raisons pour lesquelles il est compliqué de se remettre au centre de sa vie est les croyances ancrées que vous avez pu développer au fil du temps. Ces croyances, perçues comme des vérités, sont souvent subtiles, presque imperceptibles, mais puissantes. Elles font office de barrière invisible, vous empêchant de vous autoriser à être une priorité.
"Je dois être disponible pour ma famille avant tout."
Vous avez peut-être été élevée avec l’idée que la famille passe avant tout. Et quand on vous parle de vous remettre au centre, une voix intérieure vous dit: "Non, je dois d'abord prendre soin des autres."
Mais qui va s’occuper de vous, si vous ne le faites pas ?
"Suivre mes envies serait égoïste."
Il y a aussi cette croyance sournoise qui vous murmure à l'oreille : "Et si c’était égoïste de penser à soi avant les autres ?" Comme si le fait de vous écouter et de vous réaliser personnellement était incompatible avec votre rôle de mère, de compagne, d’épouse. C’est pourtant l’inverse. C’est en étant alignée avec vos propres aspirations que vous rayonnerez, que vous serez une présence stable, lumineuse et inspirante pour ceux que vous aimez.
"Je ne sais plus ce que je veux."
Cela peut aussi se traduire par un sentiment flou, une sensation de perte d’identité. Après avoir été tellement concentrée sur les besoins des autres, vous avez peut-être perdu le lien avec les vôtres. Parfois, vous avez même l'impression que les besoins des autres sont devenus les vôtres. Lorsque l'habitude est de mettre les autres en priorité, il devient complexe de savoir ce que vous désirez vraiment.
Les peurs qui sous-tendent le changement
Au-delà des croyances, il y a aussi des peurs profondes qui peuvent vous freiner dans votre élan pour vous remettre au centre de votre vie. Ces peurs travaillent souvent en souterrain et ne sont pas toujours visibles, mais elles ont un pouvoir énorme. La peur de l’échec par exemple, ou la peur de ne pas être à la hauteur. Vous vous êtes habituée à vous exposer dans un certain cadre dans lequel vous êtes "la ressource", la personne fiable, et l’idée de vous aventurer dans quelque chose de différent, nouveau, sans certitude, peut être angoissante.
La peur du regard des autres peut également être un frein. Quelles vont être les réactions des proches si vous commencez à vous autoriser plus de place ? Va-t-on vous juger ? Va-t-on vous accuser de devenir égoïste ? Ces peurs liées au jugement social, ou à la crainte de ne pas être comprise, peuvent être paralysantes.
Il y a aussi cette peur de l’inconnu. Parce que se remettre au centre, c’est aussi accepter de quitter une zone connue (même si elle a été difficile sous certains aspects), pour se lancer dans un chemin incertain. L’inconnu peut être effrayant, surtout quand on ne sait pas exactement ce que l’on veut. Mais en restant figée dans la peur, vous restez à l’écart de votre propre déploiement.
Les influences de l’éducation et des normes sociales
Le poids de l'éducation et des normes sociales peut aussi être un facteur de blocage. Depuis toute petite, vous avez été influencée par des messages de la société : "Les femmes peuvent être sacrifiables", "Le rôle de la mère est de se mettre au service de sa famille". Ces idées, bien qu’inconscientes, ont façonné votre comportement. Vous avez peut-être appris à vous effacer, à vous adapter, à mettre vos envies de côté pour répondre aux attentes des autres.
En expatriation, ces normes peuvent se renforcer encore davantage. Dans un contexte où la famille est mise à l’épreuve sous plusieurs aspects - perte de repères, éloignement de la famille d’origine, adaptation à un nouveau mode de vie - il devient vital de créer un socle de stabilité. Et souvent, ce rôle de stabilisateur revient aux femmes, qui dans la majorité des cas arrivent sans emploi et assument la responsabilité de maintenir l'équilibre familial.
Ce poids supplémentaire rend d’autant plus complexe le fait de vous donner la permission de reprendre votre place et de vous prioriser.
Se remettre au centre : une prise de conscience douce
Si vous vous sentez perdue, si vous ne savez pas par où commencer, c’est normal. Si j’écris cet article c’est que vous n’êtes pas la seule. La première étape est de prendre conscience de ces croyances et peurs. Et pour cela, je vous invite à trouver un coin calme, une feuille et un stylo et à vous poser quelques questions. Portez attention aux sensations physiques qui émergent, elles sont des indicateurs fiables de votre ressenti face à ces interrogations.
Que ressentez-vous quand vous pensez à vous remettre au centre de votre vie ?
Est-ce que cela vous semble excitant ou terrifiant ?
Vous sentez-vous coupable, égoïste ou au contraire, légitime ?
Avez-vous peur de décevoir quelqu’un? ou l’impression de sauter dans le vide ?
Quelles sont les croyances qui vous traversent quand vous envisagez de vous prioriser ?
Avez-vous idée de ce que vous aimez ? ce qui vous épanouit ? ce qui vous fait vibrer ?
En vous posant cette question, ressentez-vous un vide, un nœud ou une ouverture ?
Avez-vous une avalanche d’idées qui se bousculent dans votre tête ? Ou avez-vous l’impression que savoir ce qui vous épanouit n’est pas important ?
Sentez-vous une culpabilité à l’idée de vous poser cette question ? Pensez-vous que la vie est dure et qu’on n’est pas là pour s’épanouir ?
Quelle est votre relation avec l’échec ? le regard des autres ? L’inconnu ?
Ce sont des “concepts” auxquels vous évitez de penser ?
Ça vous rappelle de mauvais souvenirs ? Ou au contraire un sentiment d’accomplissement ?
Ces questions peuvent engendrer un auto-jugement et ce n’est surtout pas l’objectif. Ces questions sont là pour vous guider vers une prise de conscience de ce qui vous empêche de cheminer vers le déploiement de vos ailes.
Se remettre au centre de sa vie n'est pas égoïste. C’est se donner la permission de vivre pleinement. Nous nous sommes tous incarnés pour manifester notre Être profond, pour partager nos talents, nos qualités, les “épices” particulières qui constituent l’unicité de qui nous sommes. Ne pas le découvrir et le manifester serait passer à côté de la raison même de notre présence ici. Ce n’est pas seulement un acte personnel, c’est un acte profondément relationnel et spirituel. En nous autorisant à vivre en accord avec notre essence, notre lumière brille, illumine et inspire les autres à faire de même. Refuser cette exploration, c’est laisser nos dons en friche, et priver le monde de la beauté singulière de qui nous sommes.
Dans le prochain article, nous parlerons justement des étapes pour vous reconnecter à vous, à vos envies, à vos rêves. Après tout ce que vous avez donné, vous méritez de vous redécouvrir et de déployer une vie qui vous ressemble vraiment.
Ecrit pour Expat Pro par Anelor de Boisset, Coach en déploiement de soi
Son site : www.anelor.coach
Coach certifiée depuis 2019, Anelor accompagne les femmes expatriées qui ont mis de côté leurs rêves et ambitions pour soutenir le projet d’expatriation de leur famille. Elle les aide à construire une vie qui reflète véritablement qui elles sont, en harmonie avec leurs aspirations, tout en tenant compte des défis et des opportunités uniques de leur expatriation.
Elle facilite plusieurs types d’espaces : séances de coaching individuelles, ateliers de groupe, cercles de femmes et retraites.