Le recours à la médiation familiale est-il adapté en contexte international ?

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Vous rencontrez des difficultés dans votre couple ? Envisagez le divorce ou la séparation dans un contexte international ? Vous résidez à l'étranger ou vous êtes un couple mixte en France ou à l’étranger ? Savez-vous que le recours à la médiation familiale peut vous être bénéfique, de surcroit lorsque le médiateur/ la médiatrice familial(e) est sensibilisé( e) aux questions interculturelles.

Envisager un divorce ou une séparation n’est jamais quelque chose de facile, mais les éléments d’extranéité quels qu’ils soient complexifient la donne.

Il convient dans un premier temps d'expliquer ou de rappeler en quoi consiste la médiation familiale .

Il s’agit d’ un mode amiable de résolution des conflits, hors procédure judiciaire ou en parallèle, dans le cadre duquel, le couple qui rencontre des difficultés de communication peut dans un espace confidentiel et sûr, en présence d'un tiers impartial, le médiateur, se rencontrer pour discuter afin de trouver une solution à leur différends, quelle que soit leur nature ( enfants, finances).

La médiation permet de rétablir une communication là où il n’y en avait plus, ou de la faciliter lorsqu’elle est compliquée.

Le médiateur n’apporte pas de solutions, ne donne pas de conseils juridiques. Il procure un espace aux médiés pour qu’ils puissent s’exprimer et trouver les solutions par eux-mêmes.

Par la suite, lorsqu’un accord intervient dans le cadre de la médiation, il suffit de le faire homologuer par un juge.

La médiation apparait comme un mode de résolution des conflits idéal dans le cadre de conflits familiaux impliquant des couples mixtes, parlant des langues différentes, ayant des cultures ou pratiquant des religions différentes, induisant des attentes divergentes et des compréhensions opposées des difficultés rencontrées.

Dans le cas de français qui vivent à l'étranger depuis des années, le recours à la médiation, peut rassurer par rapport à l’option « tribunal ». Loin de ses proches et de ses repères, se voir proposer une solution pour résoudre les conflits, et ne pas en créer davantage s’avère rassurant.

Pourquoi choisir la médiation en contexte international plutôt que la voie judiciaire ?

Tout simplement parce que les difficultés rencontrées et les désaccords se retrouvent exacerbés par le contexte international. Toutes les émotions, les craintes, les peurs, la colère, bref tout ce qui nous empêche de réfléchir, de fonctionner et donc de communiquer vont être amplifiés.

Si l'on rajoute à cela les problématiques propres à l’expatriation, la peur d’être séparé de ses enfants si l’on doit rester du fait de son travail dans le pays d'accueil et que les enfants rentrent dans leur pays d'origine, la crainte du parent qui n'a plus d'activité professionnelle, car conjoint suiveur, de se retrouver en difficulté financière dans le pays d’accueil, on comprend vite comment l'agressivité de chaque partie peut se décupler et les empêcher de réfléchir et d’agir dans l’intérêt de leurs enfants.

La médiation familiale va permettre d’apaiser ces conflits et de rétablir le dialogue, en s’adaptant à la situation. Lorsque la situation est vraiment compliquée et tendue entre les conjoints, et qu’il est impossible de les réunir dans la même pièce, on aura recours à la médiation dite « navette », le médiateur passant d’une pièce à l’autre, même en ligne.

La médiation va permettre d’éviter que les enfants ne se retrouvent pris en otage. Plus les parents se déchirent, plus les enfants pâtissent de la situation. Dès que la communication est rétablie, même si elle est difficile, même si ce n’est pas toujours de façon très aimable, les enfants vont ressentir la différence. Les parents pourront se décharger pendant la séance de médiation de leur colère, et au fur et à mesure des séances, les tensions s’en trouveront réduites.

Peu à peu les parents vont pouvoir discuter des points importants qui les préoccupent, car ils ne seront plus aveuglés par la colère ou la peur.

La médiation est volontaire et confidentielle. Ainsi ce qui est discuté pendant la médiation et les points abordés ne sortiront pas de l’espace de médiation sans l’ accord des médiés. De ce fait les médiés peuvent envisager entre eux tous les scénarios possibles et discuter de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas.

C’est l’occasion de pouvoir enfin écouter ce que l'autre a à dire, ce qui va permettre la mise en place de solutions pérennes pour les parents et les enfants. En contexte international il est nécessaire d’être créatif pour trouver des solutions qui peuvent convenir à toutes les parties concernées et cela nécessite de prendre le temps de discuter et d’évaluer les propositions de chacun.

Autre argument en faveur de la médiation en contexte international, le gain financier. A l’étranger, on peut de se trouver très vite embourbés dans des procédures judiciaires couteuses, parfois dans plusieurs pays, et parfois même obtenir des décisions contradictoires.

La médiation, même si la situation nécessite de nombreuses séances, restera toujours plus avantageuse financièrement.

Il faut également prendre en compte le gain de temps, argument non négligeable lorsque l’on sait que les décisions portant sur les enfants peuvent parfois prendre des années.

La médiation en contexte international permet de vous épargner émotionnellement. Avoir des séances régulières, dans un climat apaisé, au cours desquelles les médiés avancent pas à pas vers une solution qui convient à toutes les parties concernées, est toujours préférable à se retrouver dans une procédure judiciaire longue et couteuse, à laquelle on ne comprend pas grand-chose, où l’on se déchire de façon passive par l'intermédiaire de ses avocats pour se voir imposer une décision par un tiers, qui ne connaît pas les parties. Cette décision sera toujours en défaveur de l’un ou de l’autre.

Aboutir à un accord grâce à la médiation en contexte international apportera plus de satisfaction, que de tenter de faire souffrir l’autre en faisant trainer une procédure longue et couteuse, qui aura au final pour effet de ne pas permettre de passer à autre chose, et de maintenir les parties dans un entre deux, difficile à vivre.

La médiation est également l’alliée d’une coparentalité réussie : N’y a-t-il rien de pire que des enfants qui quel que soit leur âge, souffrent à chaque fois qu’ils doivent envisager de fêter évènement en famille, car ils redoutent de réunir leurs parents dans la même pièce.

La médiation permet de mettre en place une relation de co-parentalité qui perdurera dans le temps, après le prononcé du divorce. Les parents apprennent à se mettre d’accord sur les besoins de leurs enfants et sur la façon de répondre à ces besoins. Dans le contexte international, ce sera réfléchir à

  • comment maintenir la place du parent qui habite loin de l’enfant ?
  • comment assurer des moments de qualités plutôt que la quantité ?
  • comment comprendre qu’il convient parfois de se détacher des schémas habituels, afin de trouver une solution pour les enfants et les parents, pour que tout le monde y trouve son compte ?


La valeur ajoutée du médiateur familial international

Le médiateur familial international est un médiateur qui a une sensibilité internationale c’est-à-dire une expérience et une compréhension des difficultés rencontrées par le couple en contexte international. Il peut avoir été bercé par plusieurs cultures, peut avoir vécu à l’ étranger ou y vivre encore, avoir lui-même une famille inter culturelle. Il peut parler plusieurs langues ce qui peut faciliter les échanges.

Mais au-delà de la langue, l’ouverture d’esprit que procure cette influence de l’international, fait de lui la personne la mieux placée pour vous guider dans vos interactions.

Cette sensibilité du médiateur international va permettre aux uns et aux autres de comprendre les raisons pour lesquelles il y a pu y avoir une rupture de la communication ou des blocages. Les différences de cultures conduisent à avoir des attentes divergentes par rapport à l'éducation des enfants ou à la perception de l'argent par exemple

Arriver à en discuter sereinement en présence d'un tiers impartial, va permettre à chacun d’enlever ses œillères et comprendre d'où vient l'autre avec ses propositions ou tout simplement par son refus d'envisager des solutions.

Sa connaissance de l’expatriation, pour l’avoir vécue par exemple, fait qu’il comprend les sacrifices, les sentiments ambivalents des couples par rapport au pays d’accueil vs le pays d’origine, et son accompagnement va permettre d'avancer sur des points qui semblaient impossibles à résoudre.

Mener une médiation dans plusieurs langues en utilisant les termes que les médiés connaissent, leurs points de repère, les procédés utilisés dans un pays, va faciliter l’ accord qui pourra être homologué par la suite dans un autre pays.

Il est donc important de bien choisir son médiateur

Il faut souvent s’adapter à la culture du pays dans lequel se trouvent les époux. Par exemple à Hong Kong les médiations vont souvent se faire sur une journée ou une demi-journée car il est très difficile d'obtenir des jours de congé et l’on préfère faire cela d’une traite. Alors qu’au contraire en Angleterre ou en France la médiation se fera plutôt par séances de deux heures ou trois étalées dans le temps.

De nos jours la médiation est beaucoup plus facile à mettre en place en contexte international grâce à internet, en ligne.


Conclusion

Comme vous avez pu vous en rendre compte à la lecture de cet article la médiation familiale en contexte international s’impose comme un mode de résolution des conflits efficace, à condition bien entendu de bien prendre toutes les précautions qui s’imposent.

On observe très vite un changement total dans l'attitude des personnes qui acceptent d'embarquer dans le processus.

Encourager les couples traversant une séparation difficile à y avoir recours, plutôt que d’encourager les recours au juge sous prétexte qu’il y a des enjeux financiers à préserver en méconnaissance totale des intérêts des enfants, devrait être la solution préconisée par les avocats de la famille intervenant en contexte international.

Il convient d’éduquer tout le monde et peut être même les professionnels du droit en premier sur l’importance de tenter la médiation afin de calmer les esprits et de donner une meilleure chance à ces couples, ces parents, ces enfants.


Ecrit pour Expat Pro par Maître Sarah-Jane Tasteyre.
Avocate en droit de la famille et médiatrice familiale internationale
, elle assiste les Français de l’étranger dans le domaine du droit de la famille (contrat de mariage, divorce, séparation, autorité parentale, adoption…) de la planification successorale (testament, désignation de tuteurs, procuration) et des successions internationales.
Son site : 
https://www.tasteyrefamilylaw.co.uk/