L’expatriation représente bien plus qu’un déménagement à l’étranger. Elle bouleverse les repères, redéfinit les équilibres familiaux et interroge profondément l’identité, notamment celle du conjoint suiveur.
Pour le conjoint expatrié, suivre son partenaire est souvent une évidence… jusqu’à ce que s’installe une question plus intime et bouleversante : « Et moi, dans tout cela, qui suis-je devenu(e) ? »
Une perte de repères, mais aussi une opportunité de croissance
Suivre son conjoint à l’étranger, c’est accepter de tout quitter pour un nouveau départ.
Mais c’est aussi accepter de mettre entre parenthèses sa propre trajectoire. Et malheureusement, derrière l’aventure et la découverte, de nombreux conjoints d’expatriés ne s’y retrouvent pas : perte de repères, sentiment de ne pas trouver sa place, isolement, remise en question de son identité professionnelle et personnelle,…
Pourtant, l’expatriation peut devenir un formidable levier d’évolution et de croissance personnelle pour le conjoint qui accepte de tout quitter en suivant son partenaire à l’étranger. En effet, en profitant de ce temps de pause imposé dans un environnement totalement différent, le conjoint s’offre l’opportunité de clarifier ses envies et de se (re)découvrir. Conscient de ses aspirations, de ses talents et de ses valeurs, le conjoint suiveur peut alors tracer sa propre voie, plus en accord avec lui-même et plus épanouissante.
Ce n’est pas se perdre que de suivre. C’est se donner la chance de se (re)découvrir.
L’expatriation, un chemin de transition
L’expatriation est souvent présentée comme une expérience enrichissante. Mais derrière cette image valorisée, le conjoint suiveur vit une toute autre réalité, beaucoup plus sombre. Non reconnue, voire incomprise, cette transition difficile est vécue le plus souvent silencieusement.
En accompagnant son partenaire dans un nouveau pays et dans son évolution professionnelle, le conjoint « suiveur » quitte son emploi, son réseau, son ancrage social et culturel. Et alors que l’expatrié en poste se consacre à sa nouvelle mission, et que les enfants prennent place dans leur nouvel univers, le conjoint, lui, se retrouve en retrait. Désorienté, il a le sentiment de ne plus avoir de place claire et peut alors ressentir un véritable désalignement intérieur.
Or la transition du conjoint d’expat mérite d’être reconnue et accompagnée. Elle peut en effet être le préalable à un véritable processus de transformation vers plus de sens et d’épanouissement.
Du vide à la (re)découverte de soi
Lorsque leurs repères extérieurs s’effacent (travail, réseau, cadre familier ), beaucoup de conjoints expatriés se retrouvent face à un espace de vide. Inquiétant, ce vide peut être difficile à traverser et générer un mal-être profond. Ignoré par les proches car non exprimé ou incompris, ce malaise peut perdurer et s’enliser.
Mais à l’inverse, ce passage à vide peut aussi ouvrir une porte vers une meilleure connaissance de soi. Il constitue alors une étape essentielle dans la (re)construction de son identité vers plus de bien-être et d’épanouissement.
En effet, la mise en pause liée à l’expatriation ouvre un espace de liberté pour entamer une démarche d’introspection. Loin d’être une perte, ce temps pour soi est propice à une réflexion profonde sur ses besoins et ses aspirations, ses valeurs et ses talents.
Loin de ses repères et de ses habitudes, l’expatriation peut être le moment idéal pour répondre à des questions essentielles, souvent laissées en suspens depuis bien plus longtemps : Qui suis-je en dehors de mes rôles ? Qu’est-ce qui me fait vibrer ? Qu’ai-je vraiment envie de construire ?
En explorant ces différentes dimensions, le conjoint d’expat s’autorise à redéfinir ses priorités. Il se reconnecte à des envies oubliées ou inconnues, prend conscience de ses ressources intérieures, ou encore découvre de nouvelles formes d’expression de ses compétences.
Il se laisse alors la chance d’explorer de nouvelles voies personnelles et professionnelles, et se met en capacité de trouver celle qui sera la plus épanouissante et la plus porteuse de sens pour la suite de son parcours.
(Re)trouver sa voie en expatriation
(Re)trouver sa voie est un processus qui demande du temps. Cela nécessite parfois un accompagnement structuré pour se (re)connecter à soi-même et construire un projet personnel ou professionnel réellement aligné.
En effet, (re)trouver sa voie en expatriation ne signifie pas seulement « rebondir » en identifiant un nouvel emploi ou en remplissant son emploi du temps. Il s’agit avant tout de prendre ce temps de pause pour nourrir sa réflexion et sa confiance en soi et de suivre un chemin progressif vers soi-même Cette (re)construction identitaire permet de créer un équilibre durable, en accord avec la personne que l’on devient. La démarche est tout aussi importante, voire plus, que le résultat.
Des outils pour y voir plus clair
Pour avancer plus sereinement dans cette quête, certaines approches peuvent aider à clarifier ses besoins et ses envies :
L’Ikigai, philosophie d’origine japonaise, invite à croiser ce que l’on aime, ce dans quoi l’on est doué(e), ce dont le monde a besoin et ce pour quoi l’on peut être rémunéré(e). Cet outil simple mais puissant permet de (re)définir ses aspirations, ses valeurs et le sens de son action.
Au-delà du bilan de compétences, les bilans de motivations ou de personnalité permettent quant à eux d’identifier ses facteurs d’énergie et ses ressources, afin de mieux orienter ses choix vers une voie plus épanouissante durablement.
L’écriture réflexive, tenir un journal ou formuler ses envies et ses freins par écrit, l’échange avec d’autres conjoints expatriés offrent également un espace de recul et d’inspiration mutuelle.
L’essentiel dans cette quête vers soi-même est de se donner le temps nécessaire, de s’autoriser à explorer ses aspirations profondes, à poser les choses et à les confronter pour trouver un chemin juste, porteur de sens.
En acceptant que ce processus prenne du temps, on reconnait aussi sa propre valeur.
L’expatriation, en tant que processus de transition, devient alors une opportunité de croissance personnelle et d’évolution positive durable, bien au-delà du lieu de résidence ou du contexte professionnel.
De la dépendance au sens retrouvé
Au fil du temps, de nombreux conjoints d’expatriés découvrent ainsi qu’ils peuvent réinventer leur équilibre personnel et professionnel, indépendamment du statut, de la carrière du conjoint ou du pays d’accueil.
Mais c’est seulement en laissant derrière soi une part de son autonomie, et en s’autorisant à transformer cette dépendance contrainte en une véritable opportunité de croissance, que le conjoint expatrié identifie ce qui donne du sens à sa vie, à ses choix et à ses relations.
Initiée par la prise de recul face à la dépendance, cette redéfinition de soi devient une source de force.
Cette nouvelle clarté influence alors positivement non seulement la trajectoire individuelle immédiate et à plus long terme du conjoint expatrié, mais aussi l’ensemble de la dynamique familiale et du couple. Le bien-être des enfants est également amélioré.
L’expatriation cesse alors d’être une parenthèse subie pour se transformer en un véritable tournant de vie vers un parcours personnel et professionnel, plus aligné avec qui l’on est vraiment.
« J’ai longtemps cru que je devais attendre notre retour d’expatriation pour retrouver ma place. Aujourd’hui, j’ai créé un projet qui me ressemble et qui m’épanouit totalement. »
Un chemin exigeant mais porteur d’avenir
En conclusion, l’expatriation vécue par le conjoint peut être une invitation à un vrai travail d’introspection pour se redéfinir plus librement. En (re)trouvant qui l’on est vraiment, on choisit d’écrire soi-même la suite de son histoire.
Ce passage de la dépendance au sens retrouvé ne se fait pas d’un coup, mais par un travail progressif de réappropriation. En se reconnectant à ses valeurs, en reconnaissant ses compétences, on peut reformuler ses priorités.
En trouvant une forme d’alignement nouveau, plus conscient et plus libre, la mobilité n’est plus subie. Elle devient un facteur d’évolution. L’expatriation n’apparait plus alors comme une mise entre parenthèses, mais comme un levier de transformation pour « devenir soi ».
Le conjoint expatrié n’est plus un personnage secondaire. Il prend sa place en tant que personnage principal dans son propre projet.
Ecrit pour Expat Pro par Françoise Tilly, Coach certifiée ICF en Transitions de Vie & de Carrière, spécialisée dans l’expatriation.
Son site : https://ftillycoaching.com/