L'expatriation d'un salarié français vers le Maroc peut avoir lieu dans le cadre d’un détachement, d’un expatriation ou d’un contrat local. Ceci implique plusieurs aspects importants en matière de droit social, tant pour le salarié que pour l'employeur.
Ces modalités sont régies par des conventions internationales, des accords bilatéraux, des lois locales et des démarches administratives spécifiques.
Quelles sont donc les modalités d’expatriation (I) ainsi que la réponse sociale apportée aux Français s'installant au Maroc pour y travailler (II) ?
Les modalités d’expatriation
L’expatriation d'un salarié vers le Maroc, peut se faire sous différents modes de salariat, qui dépendent du contrat de travail, de la durée de l’expatriation, et de l’organisation entre l’employeur et l’expatrié.
1. Le Détachement
Le détachement est l'une des options les plus courantes pour les expatriés qui partent travailler à l'étranger tout en restant rattachés à leur entreprise d'origine.
Le détachement consiste pour un employeur à envoyer un salarié vers un pays étranger pour une mission temporaire tout en maintenant son contrat de travail avec l’entreprise d'origine.
Le salarié ne doit pas avoir été recruté dans l’objectif du détachement ni être envoyé au Maroc en remplacement d’un fin de détachement d’un salarié.
La France et le Maroc ont signé une convention bilatérale de sécurité sociale qui représente le texte de référence en matière de détachement.
Le détachement est temporaire, d’une durée maximale de 3 années renouvelable une fois sous condition d’autorisation. Si l’expatriation dure plus de 3 ans, l’expatrié sera soumis au droit marocain s’agissant des régimes sociaux et fiscaux.
Le salarié détaché reste affilié à la sécurité sociale française, ce qui lui permet de continuer à bénéficier de la couverture santé, retraite, et autres prestations sociales françaises après obtention d’une attestation de détachement auprès de l'Urssaf.
La réglementation des changes marocaine est restrictive et ne permet pas la sortie libre de fonds depuis le Maroc vers un pays étranger. Le détachement permet au salarié, s’il le souhaite, de recevoir ses revenus sur un compte en devises afin de pouvoir disposer à l’étranger de ses revenus, en raison des limitations prévues par la réglementation des changes marocaine.
En vertu de la convention de non-double imposition entre la France et le Maroc, il peut bénéficier d'exonérations ou de crédits d'impôt.
2. L’Expatriation
L’expatriation est un mode de travail permanent ou de longue durée, dans le cadre de laquelle le salarié est soumis aux lois et régulations sociales du pays d’accueil, en l’occurrence le Maroc.
Dans le cadre de l’expatriation, le salarié sera transféré vers une filiale ou une succursale située au Maroc et travaillera sous les lois marocaines.
Le régime de l’expatriation permet au salarié une réintégration dans le cadre de l’entreprise d’origine.
Les travailleurs étrangers au Maroc sont soumis au régime des contrats de travail étrangers, un contrat de travail nécessitant une autorisation et le Visa du Ministère du travail, sous une forme harmonisée et réglementée, renouvelable chaque année.
Le salarié expatrié sera affilié au système social marocain. Cela implique qu’il devra cotiser à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS).
Le salarié qui réside au Maroc plus de 183 jours par an sera considéré comme résident fiscal marocain et devra payer ses impôts au Maroc.
3. Le Contrat Local
Lorsqu'un salarié français est recruté directement par une entreprise marocaine, il est sous un contrat local marocain.
Les règles de droit social, de sécurité sociale et de fiscalité seront les mêmes que pour les expatriés.
La réglementation du travail marocaine
1. Le Contrat de Travail
Un salarié français expatrié au Maroc peut être employé sous deux types de contrat principaux :
- Contrat local marocain : Le salarié sera soumis aux règles du droit du travail marocain (congés, heures de travail, sécurité sociale, etc.).
- Contrat étranger : Si l'employeur français décide de détacher un salarié en mission au Maroc, ce dernier peut rester sous le régime juridique français, bien que certaines règles marocaines s'appliquent (fiscalité locale, assurances, etc.).
Le contrat peut être un CDD (contrat à durée déterminée) ou un CDI (contrat à durée indéterminée). Les salariés ne pouvaient pas, jusqu’à une décision récente de la Cour de cassation marocaine, faire l’objet de CDI. Les salariés étrangers au Maroc subissaient des CDD successifs qui n’assuraient pas une protection suffisante en cas de licenciement. Un revirement de jurisprudence récent a permis aux salariés étrangers d’être soumis aux mêmes règles que les salariés marocaine.
Dans le cas d'un expatrié détaché, le contrat sera souvent basé sur la législation française avec des ajustements pour tenir compte des particularités locales.
Seront envisagés ci-dessous les modalités de travail de droit marocain.
2. Assurance Maladie et Retraite
Le salarié devra cotiser à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS). Cette dernière couvre la maladie, l’accident du travail, la retraite, et les prestations familiales.
Cependant, de nombreux expatriés préfèrent souscrire une assurance santé privée internationale pour compléter leur couverture, notamment pour les soins dans des hôpitaux privés ou pour des interventions en dehors du Maroc.
Les cotisations à la CNSS permettront à l'expatrié de bénéficier d'une pension de retraite basée sur les revenus générés au Maroc, en complément d’une éventuelle retraite en France si le salarié reste affilié au régime français.
3. Imposition des Revenus et Fiscalité
La France et le Maroc ont signé une convention de non-double imposition qui permet d'éviter au salarié d’être imposé deux fois sur les mêmes revenus.
En tant que résident fiscal au Maroc (plus de 183 jours par an), le salarié expatrié sera généralement soumis à l’impôt sur le revenu marocain pour ses revenus perçus au Maroc. Le taux de l'impôt varie en fonction des tranches de revenus, avec des taux progressifs allant de 0 % à 38 %.
Si l'expatrié reste rattaché au régime fiscal français (notamment dans le cadre d'un détachement), il continuera à payer ses impôts en France, mais pourra bénéficier d'un crédit d’impôt ou d'une exonération sur ses revenus étrangers, en vertu de la convention fiscale.
Le salarié doit veiller à déclarer ses revenus mondiaux.
4. Le droit du travail marocain
La durée légale du travail au Maroc est de 2 288 heures par année, soit 44 heures par semaine maximum, avec une pause d'une heure pour les repas. Les congés annuels sont généralement de 1,5 jour ouvrable par mois de travail, soit un total de 18 jours par an.
Le recours au CDD est réglementé au Maroc et doit être mis en place dans les cas limitatifs de travail à caractère saisonnier, de remplacement d’un salarié par un autre en cas de suspension du contrat de travail de ce dernier (congé ou maladie sauf si la suspension résulte d’un état de grève), ou encore de l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise.
Dans tous les autres cas, l’entreprise doit conclure des CDI avec ses salariés.
Le salaire ainsi que les primes et avantages en nature sont librement négociés entre le salarié et son employeur.
Une attention particulière est à prêter à la rédaction du contrat de travail afin s’assurer la protection des salariés (formation, télétravail, mobilité géographique, etc.).
Si le salarié est licencié, il peut avoir droit à des indemnités de licenciement, selon son contrat et les conditions légales locales.
5. Rupture de Contrat et Licenciement
En cas de rupture de contrat, les règles marocaines en matière de licenciement s'appliquent.
Selon le type de contrat (CDI ou CDD), l'employeur doit respecter des procédures strictes en cas de licenciement (notamment une notification préalable et des indemnités de licenciement en fonction de l’ancienneté).
Le licenciement en droit marocain est soumis à un formalisme stricte dont l’objectif est de protéger le salarié.
6. Le droit au séjour
Un salarié français souhaitant travailler au Maroc, quel que soit son statut, devra obtenir un titre de séjour. Il s’agit d’un titre de séjour fondé sur le contrat de travail étranger.
Les membres de la famille de l’expatrié bénéficieront du droit au séjour au Maroc.
Ecrit par Maître Zineb Naciri-Bennani, Avocate au Barreau de Paris et au Barreau de Casablanca. Elle accompagne les expatriés pour l’ensemble de leurs besoins en droit de la famille, droit du travail et commercial.
Son site : https://bennani.legal/